mardi 24 avril 2012

BIBLIOTHEQUE NATIONALE DE FRANCE - MITTERAND


Basé à Paris, l’atelier Polygraphik fut fondé il y a deux ans par la graphiste Juliette Cheval et le designer Sébastien Nicot. Leur définition du terme polygraphique est la suivante «se dit d’un être ou d’un objet enclin au multiple, qui s’apparente à l’hybridité, au combinatoire. D’un être ou d’un objet qui tend à la métamorphose et au changement plutôt qu’à la permanence et à l’immobilité.» (1) Leur démarche est perméable à différentes disciplines. En effet, la complémentarité est pour eux essentielle. Polygraphik collabore avec des architectes, des scénographes, des écrivains, des photographes, des programmeurs etc. pour des projets expérimentaux comme pour des projets de commande. Leur objectif étant d’arriver à créer des passerelles des uns aux autres afin de nourrir leur réflexion et créations.


Restructurant ses espaces d’accueil et en attente d’une nouvelle signalétique, la Bibliothèque nationale de France a fait appel au duo afin de «corriger» la signalétique existante et d’améliorer sa lisibilité pendant les quelques années précédent cette rénovation, le tout dans un soucis d’économie de moyens. 
À la façon d’un texte en relecture, les stèles présentent aujourd’hui des ratures, des corrections et des annotations en jaune. Chaque stèle est annotée par des éléments en adhésif opaque jaune posés en face avant. 
Ils reprennent et interprétent les notes d’un manuscrit en re-lecture, affirmant ainsi clairement une étape intermédiaire dans cette restructuration des espaces. À l’arrière avec un adhésif dépoli, ils viennent soutenir les informations existantes et les rendre plus lisibles; la signalétique se lit donc en deux temps.



Laisser les erreurs apparentes reste une démarche peu exploitée dans le graphisme. En effet, à l’ère numérique où la pratique presque systématique des logiciels tels que Photoshop, on constate que la notion de beau est largement mise en avant. Le défaut est gommé et l’image devient lisse, dénuée d’imperfection. Cette démarche très usitée en publicité fait ses preuves. Jean-Paule Goude, illustre artiste, manipulateur d’images, tour à tour illustrateur, directeur artistique, photographe et réalisateur possède une démarche du beau. Christian Caujolle (2), dira à propos de la démarche de l’artiste: «il est en quête permanente d’un fait que peu savent nommer aujourd’hui : la beauté.» L’artiste sublime l’image, ainsi la femme devient un mythe, une créature de rêve. De façon formelle Jean-Paul Goude utilise le montage photographique. Chaque montage est construit selon cette notion de beauté et pour cela aucune anomalie transparaît.

Cependant, on peut remarquer aujourd’hui certains graphistes s’autorisant l’erreur, et même faisant intervenir celle-ci dans le processus de création.
L’erreur ne devient plus un handicap, mais une zone d’expérimentation, elle n’est plus une perte de temps, ni une mine de déroute.

L’étudiant Killian Loddo cotoîe de près les notions d’indécision et ainsi d’erreur dans son projet de diplôme (3). Ce dernier met en forme le poème de Mallarmé, Un coup de dés n’abolira jamais le hasard, l’aléatoire et les erreurs se manifestent par un non choix dans les supports, une superposition des formats, et une illisibilité du texte orchestrée par les fonctions des outils informatiques.

Tout comme cet étudiant, le studio Polygraphik cherche à s’approprier leurs erreurs et ainsi les faire participer dans la création. Ce qui devient paradoxal, c’est que ces essais se trouvent confortés par une beauté, une évidence formelle. L’erreur n’est donc pas à nier, elle fait force dans le processus de création, et conduit à une réponse graphique aboutie et esthétique.

Marion Thébault, DSAA, LAAB Rennes Bréquigny, avril 2012.


(1) Cheval (J) et Nicot (S), définition subjective du binome (en ligne), disponible sur: http://www.polygraphik.com/index.php?/infos/-polygraphik/, consulté le

(2) Caujolle (C) fondateur de l’agence et de la galerie Vu.

(3) Loddo (K), étudiant en DSAA à Nevers en 2009.





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